Thursday, July 5, 2012

"Règles de l'écriture" selon R.A. Heinlein

Sur son blog, Dean Wesley Smith fait référence aux 5 règles de l'écriture "pro" selon Robert A. Heinlein, notamment appliquées à l'écriture numérique.


Je vous invite à consulter le billet (comme la plupart de ses billets, ainsi que ceux de son épouse , Kristin Kathryn Rusch), ainsi que comme d'habitude les commentaires.


Parmi lesdits commentaires, plusieurs d'entre eux mentionnent la sixième règle, explicitée par Robert J. Sawyer. En cherchant un peu (un clic), et je suis tombé sur ce lien : Heinlein's Rules

Avec l'accord de l'auteur, j'en ai fait une traduction, que j'espère raisonnablement fidèle. Il faut noter que le billet initial a été écrit en 1996, et s'applique donc à "l'industrie" du livre tel qu'à cette époque, sans donc la même liberté d'auto-publier que nous avons aujourd'hui.

Il y a de nombreuses règles pour écrire avec succès mais les plus connues, du moins dans les genre de fiction-spéculative, sont les cinq décrites par feu Robert A. Heinlein, auteur extraordinaire.
Heinlein disait qu'il n'avait aucun scrupules à donner ces règles, même si elles expliquaient comment devenir un compétiteur direct, parce qu'il savait que presque personne ne les suivrait.
Dans mon expérience, c'est vrai : si vous partez d'une centaine de personnes qui disent vouloir devenir auteur, vous perdez la moitié des restants à chaque nouvelle règle. Au moins la moitié des gens qui entendent chaque règle n'arriveront pas à la suivre.
Je vais partager les 5 règles d'Heinlein avec vous, et ajouter ma propre sixième.


Règle Un : Vous devez écrire
Ca semble ridiculement évident, n'est-ce pas ? Mais c'est une règle très difficile à suivre. Vous ne pouvez pas vous contenter de dire que vous voulez devenir écrivain. Vous ne pouvez pas vous limiter à prendre des cours, ou lire au sujet du processus d'écriture, ou réver de vous décider à le faire n jour. Le seul moyen de devenir écrivain est de vous planter devans votre clavier et vous mettre au boulot.
Et n'essayez même pas de vous plaindre de ne pas avoir le temps d'écrire. Les vrais écrivains achètent leur temps d'écriture s'ils n'en trouvent pas autrement. Prenez par exemple Terrence M. Green, enseignant d'angalis en lycée. Son troisième roman, "Shadow of Ashland" sort tout juste chez Tor. Terry prends un an sur 5 en congé sans soldes pour écrire ; la plupart des auteiurs que je connais ont fait de pareils sacrifices pour leur art.
(Sur nos cinquante aspirant auteur d'origine, la moitoé ne va pas même se mettre à écrire quoique ce soit. Ca nous en laisse conquante...)

Règle Deux : Finissez ce que vous avez commencé
Vous ne pouvez pas apprendre à écrire sans amener une oeuvre à sa conclusion. Oui, les premières pages que vous sortez sont peut-être faiblardes, et vous pourriez être tentés de les jeter. Ne le faites pas. Continuez jusqu'au bout. Une fois que vous avez un premier brouillon global, avec un début, un millieu et une fin, vous verrez à quel point i est facile de voir ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas. Et vous ne maîtriserez jamais des choses comme l'intrigue, le suspense et le développement de personnages tant que vous n'aurez pas fini une oeuvre complète.
A propos : Si vous faites parti d'un groupe d'écriture, ne laissez pas les gens critiquer votre roman chapitre par chapitre. Personne ne peut correctement juger un livre sur un morceau pioché au hasard, et vous vous retrouverez avec toutes sortes de conseils inutiles : "cette partie semble inutile." "Et bien non, en fait c'est très important une centaines de pages plus tard..."
(Sur nos cinquante écrivains potentiels, la moitoé ne finiront rien, ce qui en laisse vingt-cinq encore en course...)

Règle Trois : Vous devez vous abstenir de ré-écrire, sauf sur ordre éditorial*
(* Note : Harlan Edison a complété cette règle : "et seulement si vous êtes d'accord" , cité par Dean Wesley Smith)

C'est celle-ci qui a causé des problèmes à Heinlein auprès des professeurs de création littéraire. Peut-être qu'il aurait été plus approprié de la formuler ainsi : "Ne bricolez pas sans fin votre histoire." On peut continuer de modifier, corriger et polir à jamais. Un vieil adage dit que les histoires ne sont jamais terminées,  juste oubliées -- Apprenez à abandonner la votre.
Si vous constatez que vos dernières corrections reviennent à remettre dans l'état d'une étape précédente, alors il est temps de pousser le bébé hosr du nid. Et même si de nombreux débutants ne le croient pas, Heinlein a raison : Si votre histoire est presque publiable, les éditeurs (au sens editor et non pas publisher) vous diront ce qu'il faut faire pour le rendre publiable. Certains magasinez à petit-tirage le font, mais vous aurez aussi des conseils par "Analog", "Asimov's" et "The Magazine of Fantasy & Science Fiction".
(Sur nos vingt-cinq auteurs restants, douze von ciontinuer de paufiner indéfiniment et se mettent hors-jeu. Douze autre vont finaklement décider leur oeuvre finie. Le vingt-cinquième, que vous avez coupé en deux, est maintenant désespérément à la recherche de ses jambes...)

Règle Quatre : Vous devez mettre votre histoire sur le Marché

Cette règle ci est la plus dure pour tous les débutants. Il ne suffit pas de se déclarer auteur professionnel. C'est plutôt un titre qui doit vous être donné par ceux qui sont près à vous payer pour vos mots. Jusqu'au moment où vous montrez effectivement votre travail à un éditeur, vous pouvez fantasmer être aussi bon que Guy Gavriel Kay ou William Gibson. Mais confronter ce fantasme à la réalité est très difficile pour de nombreuses personnes. Je connais une aspirant auteur canadien qui s'est débrouillé pour retarder de deux ans l'envoi de son livre parce que, disait-il, il n'avait pas de timbres américains pour les enveloppes auto-adressées. Et cela marlgré le fait qu'ils connaissait des dizaines de personnes qui allaient régulièrement aux USA et auraient pu lui en trouver, malgré le fait qu'il aurait pu traverser lui-même la frontière pour en acheter, malgré le fait qu'il aurait même pu se passer de timbres U -- vous pouvez acheter des "International Postal Reply Coupons" à la place, disponibles dans tous les grands bureaux de poste.
Non, ce qui lui manquait ce n'était pas les timbres, mais du courage. Il avait peur de savoir si sa prose était vendable. Ne soyez pas peureux : envoyez votre copie.
(Sur nos douze auteurs restants, six n'arrivent pas à se décider à envoyer leur manuscrit? Restent plus que six...)

Règle Cinq : Vous devez le laisser sur le marché jusqu'à ce qu'il soit vendu

C'est un fait : les oeuvres se voient rejetées tout le temps. Il est presque certain que votre premier envoi sera rejeté. Ne laissez pas ça vous arrêter. J'ai actuellement 142 lettres de refus dans mes cartons ; tous les auteurs professionnels que je connais en ont des tas (le prolifique auteur d'horreur canadien Edo van Belkom fait un très bon show lors des conventions SF appellé "Thriving on Rejection" (s'épanouir sur le rejet) dans lequel il lit des extraits des nombreuses lettre de rejets accumulées au fil des ans).
Si la lettre contient des conseils qui vous semblent pertinents, mettez-à-jour l'histoire et renvoyez la. Sinon, remettez la à la poste pour quelqu'un d'autre. Persistez. Mon propre record pour le nombre d'envoi avant de vendre une histoire est de dix-huit -- et finalement l'histoire a trouvé une belle maison (et en quelques jours, je l'ai de nouveau vendu pour une anthologie de re-impressions ; avoir une histoirte en impression la première fois ouvre de nouveaux marchés.)
Si votre histoire est refusée, envoyez-là le jour même à un autre marché.
(Encore une fois, sur les six auteurs restants, trois seront tellement découragés par ce rejet qu'ils vont abandonner l'écriture pour de bon? Mais trois continueront.)

Règle Six : Démarrez l'écriture d'Autre Chose
Celle là est de moi. J'ai vu trop d'auteurs  débutant travailler des années sur un seul et unique roman ou nouvelle. Dès que vous avez fini quelque chose, démarrez autre-chose. N'attendez pas que votre nouvelle revienne de l'éditeur à qui vous l'avez proposé; mettez-vous au travail sur un nouveau projet. (Et si vous vous retrouvez confronté à un blocage de l'écriture sur votre projet en cours, démarrez-en un nouveau -- un vrai auteur peut toujours écrire quelque-chose. ) Vous devez vous constituer un "corpus" d'oeuvres, si vous voulez vous compter parmi les écrivains pro.
Sur nos cent  aspirant-écrivains, seuls un ou deux vont suivre ces six règles. La question est : eserez-vous l'un de ceux là ? Je l'espère, parce que si vous avez au moins  un minimum de talent et que vous suivez ces règles à la lettre, vous y arriverez.

Note: 
Voici les règles telles qu'initialement présentées par Robert A. Heinlein :
http://www.writewords.org.uk/forum/65_64942.asp

I shall assume that you can type, that you know the accepted commercial format or can be trusted to look it up and follow it. Also, that you can spell and punctuate and can use grammar well enough to get by. These things are merely the word-carpenter's sharp tools. He must add to them these business habits:

1. You must write.



2. You must finish what you start.
3. You must refrain from rewriting except to editorial order.
4. You must put it on the market.
5. You must keep it on the market until sold.
The above five are amazingly hard to follow--which is why there are so few professional writers and so many aspirants, and which is why I am not afraid to give away the racket!


Maintenant que vous êtes dans la "confidence", et avez lu ces règles et l'interprétation qu'en fait Mr Sawyer, qu'en pensez vous ? Et dans quelles mesures sont elles applicables ? A votre avis, les arguments de l'auteur du billet sont ils encore valides, obsolètes ? Et rendent-eles à leur tour obsolètes les règles énoncées ?

5 comments:

  1. Ma foi, rien à y redire ! Ces arguments sont davantage consacrés à l'auteur et à son mode d'écriture plutôt qu'au marché de l'édition, si bien qu'ils seront certainement encore d'actualité dans deux cent ans si les Hommes écrivent encore d'ici là !

    J'aurais aimé connaître le rythme d'écriture de Heinlein, et savoir s'il écrivait plusieurs projets en même temps ou se consacrait 100% à un projet avant d'en attaquer un autre.

    Merci pour cette traduction en tout cas ! ;-)

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    1. C'est un plaisir :)

      L'explication de texte de la règle 4 est celle qui me semble la plus impactée : les éditeurs ne sont plus seuls sur le marché... mais c'est mon coté pro-auto-publieurs qui parle ;)

      Sinon, je ne connais pas effectivement le rythme d'écriture d'Heinlein non plus...

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  2. En fait, ce qui rend d'entrée ces règles fragiles, ou disons relatives à la situation des auteurs américains, c'est qu'il s'agit de donner un code de conduite aux "pros", aux écrivains pros, ce qui est une approche très américaine, surtout quand on compare à l'état de la SFFF en France.

    Car le problème est là : quels auteurs français de SFFF vivent de leur écriture, et en vivent bien ? Pratiquement aucun. C'est d'autant plus logique que les éditeurs de genre ont eux-mêmes des difficultés à se maintenir (ce qui rend la règle 6 illusoire).

    De ce point de vue la règle 5 en France ne pourrait pas fonctionner. Quand un auteur reçoit 18 lettres de refus ici, ben c'est foutu : il aura fait le tour des éditeurs. Et renvoyer encore et encore un texte refusé à des "petits" éditeurs ne fera que les impatienter : ils n'ont ni le temps ni l'argent pour faire aboutir le texte bancal d'un inconnu.

    Enfin la 3 n'est toujours pas claire pour moi. Si un texte parvient aux "editors" d'une maison, c'est qu'il va être publié, donc c'est ce qui se passe après que le texte ait été mis sur le marché. Ou alors il s'agit de relecteurs externes, et on peut penser à Cocyclics ou autres, qui cependant ne garantissent pas la publication.

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    1. Je pense que la règle 6 est parfaitement valide : commencer autre chose, quand on a fini avec le premier.
      Attendre indéfiniment qu'un premier roman sorte pour débuter le second, c'est pas professionnel (j'entends par pro, les auteurs qui ont pour but d'un jour vivre de leur plume - ou au moins en tirer un revenu raisonnable, pas les auteurs-amateurs qui sont content d'être publié une seule fois, sans même regarder le côté financier de l'affaire)
      Surtout que plus on écrit (finit/édite/envoie), plus on s'améliore. Si l'auteur attend que son premier roman sorte pour se dire auteur et continuer, il a tord. Le premier roman est toujours médiocre, c'est en écrivant qu'on devient écrivain. J'ai écris 3 romans avant de publier le 1er (qui est en fait le 4ème du coup) parce qu'il était le premier que je considérais comme à peu près publiable (au moment où j'ai publié, l'idée était "Il est potable, je peux pas faire mieux avec ce texte, sauf à tout réécrire" tiens, idée n°3 :P que je prends comme décrite : arrêter de perfectionner votre texte sans arrêt, abandonnez-le à un moment)
      Je pense que toutes ces idées sont valables et valides en France. Effectivement, on peut le voir d'un côté purement "édition traditionnelle" et là, au bout de 30 refus on a fait un peu le tour ou on tombe dans la micro-édition qui n'apporte finalement que peut de lecteurs. Mais on peut aussi se tourner vers l'édition numérique ou l'autopublication et trouver un public via ce chemin-là.

      Quand à l'idée 3 et 4, je les garde dans cet ordre, car envoyer un texte qui n'aurait pas été édité (même si la maison d'édition peut suggérer des changements après coup), est une erreur que font trop d'auteurs. Un texte doit parvenir aux maisons d'éditions (publishers) aussi parfait que possible. Un peu comme un concours administratif : c'est pas parce qu'on a les qualités minimales requises qu'on est pris, c'est parce qu'on a été le meilleur du lot. Donc, éditer/retravailler son texte est indispensable AVANT envoie aux publishers.

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    2. Clairement, si on s'auto-publie, la règle 3 doit-être remplacée par une règle : Vous devez trouver un relecteur /correcteur de qualité, corriger les fautes de manifestes, prendre en compte ses remarques si elles vous conviennent, et éviter de réécrire au delà. Et bien entendu, avant de passer à la phase de mise sur le marché, ça va de soit.

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