Friday, June 15, 2012

Les éditeurs français ne sont pas des boulets


Dans son blog, Coffee décrit la situation de la disponibilité et du prix des ebooks en France, concernant surtout l'offre proposée par les "Grands éditeurs", et qui inclue donc la plupart des écrivains ayant pignon sur rue.

Je vous invite bien sûr à aller lire son billet.

Mais en fait, il est clair pour moi que non, les éditeurs ne SONT PAS des boulets. Comme on le sait, les gens qui sont à la tête des groupes d'édition ne sont pas nés de la dernière pluie, et s'il est plus facile d'imputer nos constats à un manque de vision, il est plus probable qu'au contraire la stratégie des éditeurs soit tout à fait réfléchie.

Le fait est que le livre numérique est une révolution mettant en cause le modèle économique de l'édition, qui s'est mis en position de force face aux autres acteurs (auteurs, libraires, lecteurs) grâce à la matérialité du livre papier : production, logistique, diffusion, distribution. Le fait est qu'encore par ces politiques tarifaires que Coffe dénonce, ils continuent de retarder au maximum le numérique.

Ce retard n'est pas de leur fait uniquement, il faut bien le dire : Si la plupart des contrats récents incluent des clauses spécifiques liées aux ebooks, les éditeurs n'ont pas forcément les droits sur toute la production. D'ailleurs, il est possible que derrière les rideaux, des tractations se passent, auteur par auteur, pour négocier les droits numériques, ce qui retarde d'autant l'exploitation.

Pour autant, et malgré ces obstacles au passage numérique, je ne suis pas sûr qu'effectivement, les éditeurs soient mécontents de ce genre de pretextes ou retards : Tant que le numérique n'a pas définitivement décollé, ils peuvent continuer d'engranger les bénéfices sur le papier, augmentés des recettes liées au numérique et sur-payées par les quelques lecteurs trop honnêtes pour aller voir de l'autre côté de la légalité ou trop occupés pour chercher chez les éditeurs et auteurs "indépendants".

Ajoutez à celà le fait qu'un marché numérique faible leur permet également d'enfumer les auteurs : "Vous voyez, le numérique ça ne paie pas. Alors vous pouvez signer ce petit avenant. Ayez confiannnnnnceeeeeeeee. Donnez nous votre précieeuuuuuux."
( http://readingandraytracing.blogspot.com/2012/04/reedition-inequitables-droits-du-livre.html )

Et sans vouloir présumer d'une quelconque malhonnêteté  des éditeurs français, je me permet de souligner un lien de parenté fréquent avec les maisons d'éditions américaines, sur lesquelles planent de graves soupçons de mauvais compte-rendu des ventes numériques *.

Ne vous inquiétez pas pour eux. Une fois qu'ils auront rempli leur coffre-forts d'avenants avantageux pour eux et des droits sur les oeuvres indisponibles (http://scinfolex.wordpress.com/2012/02/19/oeuvres-orphelines-une-conclusion-en-forme-de-trompe-loeil-legislatif-et-les-consequences-a-en-tirer/),   complétés par les oeuvres numérisées par Google ( http://owni.fr/2012/06/13/la-part-dombre-de-google-livres/ ), ils attendront le moment idéal pour pousser au tout numérique, se délestant du poids mort papier et des syndicats d'imprimeurs par la même occasion. Quand aux libraires ...

Les actionnaires vont être HEUREUX !!

*J'avais repris sur mon blog un billet de Kristine Kathryn Rusch sur le sujet, mais voici l'original  http://kriswrites.com/2012/05/02/the-business-rusch-royalty-statement-update-2012/. Maintenant que son site est revenu, je vous encourage d'ailleurs  si vous comprenez l'anglais à le suivre...

edit: pour ajouter la mention aux rapports de vente pas forcément à jour. 



1 comment:

  1. Merci pour toutes les précisions que vous apportez et qui éclairent bien ma lanterne.

    Vous l'aurez compris, mon titre se voulait provocateur, je n'ai nul doute que les éditeurs savent parfaitement ce qu'ils font.

    Et c'est bien ce qui me met en rogne !

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